Interview – Sébastien Telleschi

« Je suis né dans le Sud-Est et j’ai grandi pas très loin d’un petit village de pêcheurs peu connu : Saint-Tropez. Après avoir commencé une carrière de sapeur-pompier dans la fournaise estivale de mon village, j’ai bifurqué et je me suis orienté vers un univers qui m’a toujours fasciné : le dessin. Cela m’a amené à quitter mon Pays Bleu et à vivre dans le gris parisien pendant quelques années (de trop). J’ai un parcours d’autodidacte : maquettiste dans des imprimeries et agences de publicité, je suis ensuite devenu graphiste indépendant, et finalement illustrateur jeunesse.

Outre le dessin, je suis passionné par la nature, la faune, la flore, l’Histoire et les gens qui vivent dans ma région d’origine : le Massif des Maures. J’aime les animaux, en sauce surtout… mais non ! En plus d’un lapin, prénommé Charlie et d’un cochon d’Inde, Monroe, j’ai deux ânes, Fifi et Monk. Ah, oui, j’allais oublier, j’ai deux enfants aussi. Cela fait plusieurs années maintenant que je vis à Nice, à quelques dizaines de mètres de la Promenade des Anglais, dans la vieille ville, où je partage un atelier avec d’autres illustrateurs, graphistes, plasticiens et dessinateurs de bande dessinée. »

 

Pourquoi avoir opté pour un album géant cherche et trouve ?

L’envie de faire ce que j’aime le plus : des images avec le plus de détails possible, en occupant un maximum de surface. Ce fut long, un peu éprouvant peut-être, surtout à la fin, mais cela reste une très belle expérience, celle d’être libre de faire ce que l’on aime. L’idée du « cherche et trouve » est venue au fur et à mesure de l’avancée du projet. Il aurait été dommage de ne pas profiter de cette foison de détails pour y cacher un petit objet difficile à trouver. De plus, dans sa recherche, cela oblige le lecteur à passer en revue les recoins du dessin, de l’apprécier encore plus, et de découvrir une foule de petites anecdotes.

 

Qu’est-ce qui vous a mené sur la piste d’un monde peuplé de lapins, de souris et de carottes ?

Je n’ai pas de passion particulière pour les lapins, mais il me fallait un univers confiné, clos, qui grouille de vie et dans lequel des personnages puissent vivre de manière autonome. Quoi de plus approprié qu’un terrier ? Ensuite, il a fallu créer une histoire simple autour de ces personnages et de cet univers. Comme il s’agissait de lapins, j’y ai donc rajouté des carottes et d’autres rongeurs, des souris, un peu plus malicieuses.

 

Un personnage préféré ?

Non, je les aime tous, mais j’ai une préférence pour le duo Lapinobalez / Lapinobouchon. J’aime bien les contrastes.

 

Le terrier de cette joyeuse tribu est à chaque fois vu en coupe. Pourquoi ce parti-pris graphique ?

Pour montrer la circulation de la vie à l’intérieur du terrier. Chaque vue est un peu comme le principe d’une poupée russe : une grande histoire qui en contient plein d’autres, certaines reliées entre elles, d’autres pas. Et la vue en coupe permet au lecteur de se promener, dans le sens et l’ordre qu’il souhaite, d’y revenir, même lorsqu’il a trouvé la Carotte Bleue.

 

Un mot sur votre technique ?

Je fais d’abord des esquisses, pour poser les idées générales de l’image. Ensuite, je réalise un dessin au crayon, très précis, sur du calque parce que j’adore cette texture. Arrive la partie informatique : je numérise ce dessin au crayon qui me sert de base, de canevas. Et je redessine complètement l’image dans un logiciel de dessin vectoriel. Je ne suis pas un passionné d’informatique, mais ce logiciel me permet d’atteindre un niveau de détail dans le dessin que je ne pourrais pas avoir de manière traditionnelle. De même pour les couleurs. Et après, c’est parti pour des heures et des heures derrière un écran.

 

À chaque page correspond une période de l’Histoire avec un grand H. Féru et passionné d’Histoire ?

Oui, j’aime beaucoup l’Histoire. Lorsque l’idée de cet ouvrage a pris corps, il m’est apparu évident que ce domaine serait un terrain de jeu idéal. J’adore dessiner les costumes, l’architecture, les machines, les uniformes, les déformer et les interpréter pour les adapter à la vie des lapins… c’est un vrai plaisir. J’ai d’ailleurs un petit regret, celui de ne pas avoir pu traiter la Renaissance et surtout une grande bataille napoléonienne : un Waterloo de l’Empire Lapin, sur une double-page, cela aurait été grandiose. Mais qui sait ? Peut-être un jour…

Croquis de recherches pour la scène de la guerre

Après avoir dessiné l’ensemble du décor avec ses personnages, il m’arrive de faire des recherches isolées pour des éléments bien particuliers, comme ci-dessus le triplan du Baron rouge, ou la bombe-carotte.

Recherches de personnages pour la scène de la guerre

De la même manière, si des personnages ont des attitudes ou des positions particulières, je les dessine à côté et les intègre ensuite au décor.

Une période qui vous a le plus passionné dans la réalisation de cet album… ou qui vous a donné le plus de fil à retordre ?

L’image la plus longue à réaliser a certainement été celle du cirque romain. On peut dire qu’à cette époque-là, le spectacle devait être de qualité, avec beaucoup de monde dans les tribunes, pire qu’un match OM/PSG ! La période que j’ai le plus aimée travailler, c’est celle de la guerre. Pour les raisons évoquées un peu plus haut, j’aime beaucoup dessiner les machines, les uniformes, et là, je ne me suis pas limité !

 

Cet album propose plusieurs niveaux de lecture : pour les petits et pour les plus grands, y compris les adultes. À qui vous adressez-vous en particulier ?

C’est un livre pour les plus petits, à lire en compagnie des plus grands qui y trouveront leurs références d’adultes. Je m’adresse en priorité aux enfants, mais pas seulement. C’est un livre à lire en famille !

 

Le mot de la fin, les carottes sont-elles cuites ?

Non, dans le monde des lapins, comme dirait Junior Lapinohapipipol, les carottes ne sont jamais assez bien cuites. L’aventure continue, et les lapins pourraient bien poursuivre leur vie dans de nouveaux univers…

Je vous dis à bientôt !

 

Crayonné du cirque romain

 

Galerie de croquis

Recherches pour la Conquête de l’Ouest

Je suis passionné par les films de cow-boys depuis ma plus tendre enfance. Je ne pouvais pas aborder l’histoire de la Conquête de l’Ouest sans faire un gros clin d’œil au cinéma américain et donc, à John Ford. L’idée m’est ainsi venue de consacrer l’image d’ouverture à un plateau de cinéma. Comme on peut le voir sur le croquis, j’avais même prévu une voiture travelling, mais j’ai finalement préféré représenter un John Ford et donner un peu plus de place au show des Indiens à cheval.

Recherches pour la scène d’ouverture du Moyen Âge

Pour représenter un lapin chevalier surchargé d’armes et d’ustensiles de tournoi, qui a du mal à se tenir sur sa selle, rien ne vaut un bon croquis.

Premier croquis de Lapinobellom

Lapinobellom en flagrant délit de séduction.

à découvrir en librairie

À la recherche de la Carotte Bleue

Dans un terrier où vivent lapins et souris, une seule obsession : retrouver la Carotte Bleue ! Une carotte unique, mythique, si précieuse que personne ne sait où elle a été mise à l’abri. Cachée ou oubliée quelque part entre la Préhistoire et le Moyen Âge, la Carotte Bleue n’est pourtant jamais bien loin.
Au fil des pages, le terrier se transforme tour à tour en cirque romain, château fort ou station spatiale.
Au fil de l’histoire, petits et grands lecteurs mènent l’enquête. Un album CHERCHE ET TROUVE avec de grandes illustrations qui fourmillent de détails et de clins d’œil.

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